Charles VII « le Victorieux » (1403 –1461) règne sur la France de 1422 à 1461. Le royaume est alors en crise et s’enlise dans la Guerre de Cent Ans.
De nos jours, Charles VII est souvent éclipsé par ceux qui l’ont servi à la guerre et au redressement du pays.
Son portrait est très contrasté : roi inactif et ingrat pour certains, sage et triomphant pour d’autres...
Et vous ? Que penserez-vous de Charles VII après la lecture de ce portrait ?
Charles, le Dauphin rebelle
Charles est le onzième fils du roi de France Charles VI et d’Isabeau de Bavière. Durant son enfance, les crises de folie de son père affaiblissent le pouvoir royal. Les querelles familiales et seigneuriales sont fréquentes, alors que la France est engagée dans la Guerre de Cent Ans contre l’Angleterre.
A dix ans, il est fiancé à Marie, la fille du duc Louis II d’Anjou. Quatre ans plus tard et après la mort de ses deux frères aînés, il accède au statut d’héritier de la couronne, celui de Dauphin.
Le puissant Duc de Bourgogne, Jean sans Peur, est allié des anglais lorsque ses partisans s’emparent de Paris et du roi en 1418. Charles s’échappe de justesse et le Duc est assassiné l’année suivante en sa présence. Décision préméditée ? Acte opportuniste ? L’implication du Dauphin fait encore débat de nos jours.
Le roi reste cependant sous contrôle des bourguignons et sa folie persiste. Charles s’autoproclame donc régent et gouverne directement une partie du royaume depuis Bourges, où il s’est réfugié. Son comportement rebelle sert les négociations du Traité de Troyes de 1420, avec le roi d’Angleterre Henri V. L’accord déclare ce dernier régent et héritier du royaume par son mariage avec une des filles de Charles VI, Catherine. Le Dauphin se retrouve exclu de la succession et des rumeurs de bâtardise se répandent pour desservir sa légitimité.
La fin de la guerre de Cent Ans
En 1422, les décès d’Henri V et de Charles VI portent deux rois à la tête de la France. Au sud de la Loire (hors Guyenne anglaise), le Dauphin devient le roi Charles VII à dix-neuf ans. Les territoires sous contrôle anglais et bourguignon reconnaissent Henri VI, fils d’Henri V et de Catherine, un enfant de onze mois.
Au début de son règne, Charles VII se déplace beaucoup dans le Val de Loire et Chinon accueille régulièrement la famille royale et la Cour. Il a offert la seigneurie et sa forteresse à sa femme, Marie d’Anjou. C’est aussi à Chinon qu’il rencontre Jeanne d’Arc pour la première fois, en 1429. Il finance son équipement et lui accorde des hommes pour la libération d’Orléans.
A cette victoire prédite par Jeanne, suit la rencontre de Loches, où elle le convainc de se faire sacrer à Reims pour asseoir sa légitimité. La cérémonie est célébrée en juillet 1429. Moins d’un an plus tard, Jeanne est capturée devant les portes de Compiègne. En juin 1431, une lettre d’Henri VI informe le pays, et probablement Charles VII, sur le procès de la Pucelle et son issue. Et la guerre continue...
Aucun accord n’est possible avec l’Angleterre, car le roi de France refuse d’abandonner sa souveraineté sur les terres occupées par ses ennemis. Une alliance avec la Bourgogne est finalement négociée en 1435, un accord précieux mais fragile. Préférant le gouvernement aux champs de bataille, Charles VII est critiqué dans son propre camp et une conspiration s’organise avec son fils aîné, Louis. Le Dauphin de seize ans s’estime plus capable de gouverner que son père, jugé faible et inactif, mais la révolte échoue.
Entre 1445 et 1448, le souverain profite d’une trêve avec les anglais pour réformer le système militaire. Il crée une armée royale et professionnelle, mieux encadrée et rémunérée, qui s’illustre avec la reprise de la guerre en 1449. La reconquête de la Normandie et de la Guyenne s’achève quatre ans plus tard. Parmi ses acteurs majeurs, citons le comte d’Orléans Jean Dunois, grand chef militaire et fin diplomate, mais aussi les maîtres de l’artillerie Jean et Gaspard Bureau, qui développent l’usage décisif des canons.
Portrait de Charles VII, roi de France 1422-1461.
France, anonyme, XXe, d’après Jean Fouquet, vers 1450.
Cité royale de Loches / Conseil départemental d’Indre-et-Loire.
Réformer pour mieux régner
Durant ces trente et unes années de guerre, Charles VII entreprend d’autres réformes pour le royaume. L’autonomie financière de l’Etat est permise avec la création du premier impôt régulier et direct : la taille. Elle était auparavant perçue par la noblesse et le clergé, qui en restent exonérés.
L’autorité royale est aussi affirmée sur le plan religieux avec la Pragmatique sanction de Bourges de 1438, qui écarte le pape de l’administration de l’Eglise de France au profit du roi. A la fin de son règne, il prend aussi des mesures pour stabiliser la monnaie et rendre la justice plus efficace.
Charles VII, également surnommé le « Bien servi », s’appuie sur des conseillers nombreux et d’origines diverses. Certains deviennent trop puissants et sont écartés par les intrigues de la Cour, comme le Grand Argentier Jacques Cœur. Ce riche marchand-entrepreneur fournit le roi et la cour en produits de luxe comme en armes, développe le commerce français et finance des phases militaires pour le roi. Mais il tombe en disgrâce, condamné pour fraude et excès de pouvoir et ses biens sont confisqués.
La fin d’un roi galant
Sur le plan sentimental, le roi a la réputation d’un galant. Il a dix enfants légitimes avec la reine Marie d’Anjou, mais ne réside pas en permanence avec sa famille.
Plusieurs maîtresses officielles se succèdent à la Cour. La première et la plus célèbre est Agnès Sorel, de dix-neuf ans sa cadette. Elle est proche de Jacques Cœur et s’implique dans la gouvernance du royaume.
Pendant les dernières années de son règne, Charles VII est inquiet. Il se déplace moins, toujours bien protégé et préfère les résidences discrètes. Son état de santé se dégrade, le désobéissant Dauphin Louis attend sa mort avec hâte et l’Angleterre représente toujours une menace.
Pris de maux d’estomac et d’un abcès aux gencives, il meurt en juillet 1461 à l’âge de cinquante-huit ans.
Pour en savoir plus :
- CONTAMINE Philippe, Charles VII, Une vie une politique, Paris, Perrin, 2017.
- MINOIS Georges, Charles VII, Un roi shakespearien, Paris, Perrin, 2005.